dimanche 26 avril 2009

LE SCOOP
OU COMMENT REVENIR SUR UN FAIT MARQUANT DU JOURNALISME D’AUJOURD’HUI

Que penser d’une personne qui se veut professionnel et qui ne vérifie pas ses sources par peur de manquer le scoop ?
Pourquoi M.Elkabach attend le journal de 19 H, avant de prendre le risque de donner l’information, pourquoi pas plus tôt ou plus tard, ou bien le lendemain ?
Parce que, peut être, c’est une édition avec beaucoup d’auditeurs, un moment où les annonceurs payent cher leur passage à l’antenne (il faudrait des données précises sur ces éléments), mais surtout, il y avait la crainte de ne pas être les premiers, les premiers à faire un bon coup et dire implicitement aux concurrents, financeurs (et auditeurs de façon secondaire), : « Voyez comme nous sommes les meilleurs découvreurs d’informations, de scoops. Car l’excellence est ici et pas ailleurs, la nouveauté et la vitesse à laquelle on la met en avant.

Avoir cette primeur qui fait briller et de dire aux téléspectateurs et auditeurs : « nous avons en exclusivité l’information… » comme si les auditeurs ou téléspectateurs voulaient, désiraient ardemment être informé au plus vite et que la reconnaissance du professionnalisme passer par cette aptitude à dégainer le premier.

Autres preuves que le monde du journalisme tourne sur lui-même et se regarde essentiellement le nombril afin de répondre à des fins purement mercantiles.
Audimat = annonceurs = financements, donc pseudo indépendance et autonomie de ton. La célèbre liberté de ton que confèrerait l’indépendance vis à vis du monde politique ou économique !!! Le monde des médias serait pur et parfait loin des influences de ces deux mondes, guidé par le soucis de vérité et d’objectivité et complètement soustrait aux logiques de l’économique /mercantile et du politique électoraliste.
Car faire de l’hyper rentabilité est incompatible, c’est mon avis, avec cet impératif d’objectivité et de vérité. Je m’explique : si les lois de l’économie dominent le monde journalistique et la production des articles/documentaires/reportages/émissions…la rentabilité devient le maître mot, donc l’audience, l’audimat, alors pourquoi s’embarrasser de considérations qui peuvent, dans nombres de cas, aller à l’encontre de cet impératif économique (et ce ne sont pas les abonnements qui font vivre les entreprises médiatiques). L’épisode Sevran en est la démonstration éclatante et le relais trop facile qu’il a trouvé dans d’autres médias dont France 2 (émission « navrante » de Ruquier par exemple) prouve que la véracité des informations est vraiment la dernière préoccupation de certains journalistes. D’ailleurs, c’est désopilant de voir que M. Ruquier (paix à son quotient intellectuel) tout du moins le rôle qu’il joue à l’écran (il faudrait interroger une équipe de psychologue pour trancher définitivement la question qui est de savoir si l’homme privé est tout aussi intelligent que l’homme public, laissons-lui le bénéfice du doute…) a déclaré que la source de l’information « Sevran » était une dépêche AFP (organisation sacrée dans le monde journalistique, caution ultime de la vérité, Vous connaissez le dicton bien connu : « si c’est l’AFP, c’est que c’est vrai, pas la peine de vérifier ») avant de s’épancher sur la personne, entre parenthèse formidablement raciste, prétendument décédée. Vous pourriez remarquer à juste titre que nous pouvons nous interroger sur le statut de journaliste de cet animateur et de ces sbires.


Autre fait troublant, dans le Monde du 06 mai que lit-on dans un petit encart dans la page consacrée à : je vous le donne « Emile » Economie et médias : « Europe 1 mise en demeure par le CSA » 12 lignes d’une information descriptive. Y a t-il eu des commentaires sur la façon dont on fait, dont on est journaliste, quel est le système qui organise ce monde, quels sont ces principes de fonctionnement, doit-on les remettre en question ou simplement les questionner ? A priori cela ne fait pas débat, cela serait un accident et ne reflèterait qu’une pratique déviante, anecdotique qui n’impose aucune introspection, c’est vrai il y a les bons et les mauvais professionnels, il n’est pas possible d’avoir des gens compétents et vertueux partout. Le problème est que le responsable n’est pas un pigiste ou un journaliste sans pouvoir qui a commis cet « impair », c’est un homme de pouvoir, un donneur d’ordre, une personne qui définit une ligne éditorial.
Ce qui est curieux, c’est que dans la vraie vie professionnelle, il est commun d’appeler çela une faute professionnelle grave et qu’en général la porte n’est pas très loin. Alors pourquoi pas de sanction ? (Je n’appelle pas une mise en demeure, une sanction, c’est tout au plus une action guidée par le principe du : faisons semblant d’être outré et d’être les garants de l’intégrité d’une profession ; il aurait été mal vu et venu de ne pas réagir, donc le CSA a assuré le minimum).

De son côté le groupe Lagardère en la personne de M.Quillot doit saluer la prise de risque de M. Elkabach et se dire que c’est ce genre de coup( lorsqu’il est réussi) qui peut contribuer à faire gonfler les bénéfices et attire les annonceurs

Le soucis, c’est que les erreurs de ce type sont légions et la pratique journalistique est toujours mue par ce principe de la chasse au scoop, ou tout du moins avoir la primeur, l’exclusivité, le traitement de l’information après importe peu finalement.
Par ailleurs, et pour confirmer cette hypothèse, nous aurions pu constater que, après le vrai /faux décès, les journaliste se serait empressés d’avoir la primeur, l’exclusivité du témoignage des personnes les pus proches de M. Sevran, la personne qui en parlerai le mieux ou de la façon la plus inédite voir croustillante. Pour appuyer mon propos, il suffit de se pencher sur le traitement médiatique des décès de personnalités et de s’apercevoir que ces pratiques sont avérées

La concurrence entre les journalistes et les organes médiatiques prend la forme d’une concurrence temporelle pour le scoop, pour être le premier
Personne ne lit autant les journaux que les journalistes, pour les journalistes la lecture des journaux concurrents est indispensable ainsi qu’une sorte de revue de presse qui devient un instrument de travail. Il est essentiel de faire mieux que la concurrence de ne pas passer à côté des unes des autres journaux, de couvrir ce que couvre l’autre en dehors de toutes considérations intellectuelles qui mêlerait introspection et réflexion sur son métier. L’essentiel est d’être le premier sur l’événement quitte à le construire de toutes pièces. Avoir la primeur, l’exclusivité sont les leitmotivs primordiaux à l’aune desquels le journalisme agit et réagit. Il s’agit également d’insérer dans la forme et le pseudo commentaire réflexif une différence qui va permettre aux auteurs de l’article de la une ou du documentaire et reportage, d’affirmer Nous sommes différents, Nous, nous faisons de l’information les autres ce n’est pas pareil ! C’est de l’opinion, de la désinformation, de la discussion du café du commerce… ».
Il est malheureusement navrant de constater cela …

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